mercredi 6 octobre 2010

Clou qui dépasse

Deru kugi wa uttareru : le clou qui dépasse est frappé. C'est un proverbe japonais assez important à connaître. Car savez-vous comment on appelle un individu rebelle, trop brillant ou marginal au Japon? Deru kugi : clou qui dépasse. Devinez ce qui leur arrive la plupart du temps?

Hé oui : ijime, le tourment. En clair : parents, professeurs et camarades de classe leur tapent dessus jusqu'à ce qu'ils rentrent dans le rang, qu'ils arrêtent de dépasser.

Cela donne l'image classique du Japon moderne : des troupeaux d'hommes et de femmes habillés de tailleurs stricts et ternes, qui marchent vers le travail du même pas sagement empressé, dociles, le visage impassible.

Comment le Japon, mère-patrie des samouraïs, des kamikazes, du bouddhisme zen et des arts du combat, en est-il arrivé là? Le recueil d'articles L'empire désorienté de Catherine Bergman nous donne un début de réponse... et nous apporte aussi une lueur d'espoir. Car tous les clous qui dépassent ne se laissent pas enfoncer. Et ce ne sont pas tous les Japonais qui brandissent les marteaux.

Catherine Bergman est journaliste. Avec son mari, ambassadeur du Canada, elle a passé de nombreuses années au Japon à l'époque du cinquantième anniversaire d'Hiroshima et elle a pu étudier la société japonaise de l'intérieur... enfin autant qu'il était possible de le faire pour une étrangère.

Suite à son expérience sur le terrain et à ses diverses enquêtes, elle nous livre une série d'articles extrêmement intéressants sur différents aspects méconnus de cette société qui se cherche, qui a honte de ses racines, qui ne sait pas quoi faire de son passé et qui s'interroge sur son futur.

C'est l'un des livres les plus intéressants que j'aie lu sur le Japon moderne, fiction et essais confondus (ce qui n'est quand même pas peu dire). À l'heure du multiculturalisme, des accommodements raisonnables et des discussions sans fin sur les valeurs québécoises, il fait réfléchir à plus d'un titre. Paru en 2001, il se trouve en bibliothèque en criant banzai! ;)

6 commentaires:

Isabelle Simard a dit…

Intéressant! Ça me rappelle mon cours de communication interculturelle à l'université. On avait une section sur le Japon. Ce que j'en avait retenu c'est que le Japon est une société où le paraître et l'honneur occupent une place prépondérante.

ClaudeL a dit…

Décidément, Gen, va falloir que tu finisses par y aller dans ce pays qui a l'air de t'attirer.

baboulebou a dit…

Bin je n'ai jamais été au Japon, mais l'image que j'ai du Japon moderne ce sont plutôt tous ces jeunes excentriques qu'on croirait sortis directement de mangas... Voir ici par exemple: http://www.japanesestreets.com/

J'imagine que dans le monde de l'entreprise c'est effectivement "l'uniforme" sobre qui domine, mais je m'imaginais les rues plus bigarrées que ça...

Interessant en tout cas, et pour sûr une société fasciante.

Éléonore a dit…

Après avoir lu Stupeur et Tremblements de Nothomb, il semble bien en effet que le Japon c'est perdu quelque part et qu'il devra se chercher longtemps pour pouvoir respirer plus librement.

Carl a dit…

Rien de mieux que d'aller y jeter un coup d'oeil ! Je suis de ceux qui s'intéressent beaucoup à la culture japonaise (j'ai longtemps pratiqué les arts martiaux, mon super réalisateur est Miyazaki et mon auteur SF adoré est Kobo Abe). J'ai la chance d'avoir une blonde qui a dit : "Si tu as un contrat d'enseignement pour l'été là-bas, je suis partante." Yessss !
À quand un roman fantasy de Kay inspiré du Japon ?
Merci pour le titre, Gen, je vais lire ça.

Gen a dit…

@Isabelle : En effet, le paraître et l'honneur sont importants, mais la guerre a beaucoup secoué la société.

@ClaudeL : C'est dans mes projets, mais je dois dire que le Japon qui m'attire le plus n'existe plus depuis longtemps ;)

@Alex : Ces jeunes existent et sont même très nombreux. Souvent, ce sont des étudiants universitaires. Là-bas, c'est la course pour entrer dans les grandes universités, mais une fois qu'on y est, les jeunes bénéficient de 3 années assez relaxe, car ils ont tellement bossé pour y arriver que l'université semble très facile. Ils en profitent pour afficher une certaine excentricité avant de devoir "rentrer dans le moule". Mais le moule devient de moins en moins rigide.

@Éléonore : Faut dire qu'Amélie a eu le tour de faire tout ce qu'il fallait pas! ;)

@Carl : Comme je dis, c'est dans les projets ;) Bonne chance pour le contrat d'enseignement. Ils sont assez faciles à avoir si tu veux enseigner l'anglais, mais c'est à peu près impossible d'y amener un conjoint. Et pour le roman de fantasy, j'espère sortir le mien avant Kay :p hihihihi Non sans farce, il y a eu assez de fantaisie faite autour du Japon. ;)