jeudi 23 janvier 2014

Cet impact qu'on ne réalise pas

Puisque j'ai parlé d'un bouquin de Martine Latulippe hier, il faut que je vous raconte...

Vous savez, des fois dans la vie on exécute des gestes qui nous sont routiniers, on prononce des paroles qui nous semblent banales, puis on découvre, souvent des années plus tard, que nous avons eu un gigantesque impact sur la personne qui a été l'objet de ces gestes ou de ces paroles. Martine a été pour moi cette personne qui a, sans le savoir, contribué à changer ma vie.

C'était à la fin de l'année 2007. Je venais de recevoir un courriel de la revue Alibis me confirmant l'acceptation de ma nouvelle "Le Double", si j'étais toujours intéressée (je leur avais envoyé le texte plus d'un an auparavant et, pour toutes sortes de raison, il était resté sur une tablette). Évidemment, j'avais sauté de joie!

Puis j'avais commencé la direction littéraire de la nouvelle, sous la houlette de Martine Latulippe. Et là je m'étais inquiétée. J'étais prête à faire les changements demandés (à ce moment-là, j'aurais changé tous les mots du texte juste pour avoir la chance de le publier!), mais je trouvais qu'il y en avait beaucoup. Était-ce normal? Est-ce que j'étais poche et que mon texte avait finalement été sélectionné juste parce que la revue manquait de matériel?

J'avais alors écrit un courriel à Martine, où je lui expliquais que c'était ma première expérience de publication et où je voulais savoir si la revue serait intéressée à lire à nouveau des textes de ma plume. Et Martine m'avait envoyé une réponse en forme de rayon de soleil, me disant qu'elle ne s'était pas doutée que c'était ma première expérience de publication et que, oui, des textes de ce niveau, la gang de la revue était très intéressée à en lire d'autres.

Cette publication dans Alibis, ainsi que les courriels échangés avec Martine, ce fut le déclencheur.

Jusque là, j'avais abandonné tout espoir d'écriture. Je travaillais 70 heures par semaine pour arriver à remplir mes obligations de nouvelle professeure au secondaire (et pour payer l'hypothèque de ma nouvelle maison). J'espérais arriver à me trouver, pour l'année suivante, une job d'enseignante au cégep, même si je commençais à comprendre que ce n'était pas un boulot pour moi. Que je n'avais pas, à long terme, la patience de materner une centaine d'étudiants. Que je ne comprenais pas leurs besoins, que je ne savais pas répéter de trois façons différentes, parce que j'avais toujours été une bollée, une chanceuse qui comprenait du premier coup, qui n'avait à peu près jamais, même à l'université, bûché sur une notion ou consulté un prof durant ses heures de bureau.

À la fin de l'année scolaire, en chômage pour l'été et forcée de me chercher un nouveau boulot (parce qu'un prof de secondaire sans brevet d'enseignement, c'est à peu près aussi bien traité qu'un vieux kleenex), j'ai relu les courriels de Martine. Contemplé le Alibis. Jasé avec mon chum à qui mon épuisement venait de faire passer une année infernale. Quand j'ai fait mes cv, je les ai délibérément axé sur mes emplois d'étudiante en secrétariat. Je savais que ce serait moins payant, mais que je récupérerais mes soirées et mes fins de semaine.

Puis je me suis assise devant mon ordinateur et j'ai écrit. Une histoire de vampires tout d'abord (hé oui, on en commet tous une un jour ou l'autre je pense). Puis le premier jet du Chasseur.

J'ai mis le blogue sur pied.

Et j'étais lancée.

Tout ça, grâce à une fée nommée Martine qui n'avait, de son point de vue, que travaillé la direction littéraire d'une nouvelle parmi d'autres.

J'espère que j'apprendrai un jour que j'ai été la Martine de quelqu'un moi aussi. :)

5 commentaires:

Isabelle Lauzon a dit…

Je connaissais l'histoire, mais je n'avais jamais pris conscience à quel point ça avait pu être un élément déclencheur important dans ton processus d'écrivain... Belle histoire, j'espère que Martine lira ça un jour! :)

Gen a dit…

@Isa : Ben oui, c'est fou comme son petit courriel avait fait une différence. Et je lui ai déjà raconté l'histoire. Je sais pas si elle s'en rappelle par contre! ;)

Martine Latulippe a dit…

Oh là là, Geneviève! Je suis émue! Bien sûr que je me rappelle que tu m'aies parlé de cette histoire, mais de la lire ainsi, si joliment écrite, je suis très touchée! Très heureuse d'avoir joué le rôle de déclencheur! Vu ton talent, j'ai drôlement bien fait!

Martine Latulippe a dit…

Et un grand merci pour ta critique!

Gen a dit…

@Martine : De rien pour la critique! :) Et pour l'histoire... Je pense qu'elle méritait d'être racontée. :) Tu as compté beaucoup dans mon parcours et je ne voudrais pas finir par l'oublier! Merci à toi!